Publié le 21 Décembre 2013

 

Contribution aux questions 5 et 7

 

Préambule

Lucien Neuwirth, homme politique français, de droite et catholique, a fait voter en 1969 la loi sur la contraception et a voté en 1974 la loi Weil sur l’IVG.

Erwann Binet, homme politique français, de gauche et catholique, a fait voter en 2013 la loi sur le mariage pour tous.

Comme de nombreux catholiques qui partagent leurs idées et leur engagement, ces deux hommes « sont aussi l’Eglise ». 

 

Question 5. Sur les unions de personnes du même sexe

Une sous-question évoque « le comportement des Eglises particulières et locales envers les personnes impliquées dans ce type d’union ». Nous constatons une chose : les couples homosexuels sont quasi invisibles dans nos églises. Nous ne connaissons pas, personnellement, de communauté paroissiale dans laquelle un couple d’hommes ou de femmes soit accueilli et reconnu comme tel. Heureusement, il existe des groupes tels que David et Jonathan, mais ont-ils la moindre visibilité dans nos assemblées ?  Sur le terrain, le comportement des catholiques semble donc être la négation, le déni, quand il ne s’agit pas de rejet.

« L’attention pastorale aux personnes qui vivent ce type d’union » doit-elle être différente de celle accordée aux époux hétérosexuels ? Nous avons constaté avec une grande tristesse le désarroi de nombreux amis homosexuels au moment des « manifs pour tous » : au nom de quoi les considérer comme des égoïstes ou des personnes superficielles, qui ne chercheraient que leur intérêt propre et voudraient des enfants comme on veut un jouet ? (Sur ce plan, est-on si sûr que le désir d’enfant des hétérosexuels soit par définition pur de tout égoïsme ou narcissisme ?) Nombre de personnes homosexuelles, et sûrement celles et ceux qui se reconnaissent dans une spiritualité chrétienne, prennent très à cœur l’engagement du mariage et pèsent longuement leur choix d’avoir des enfants. On peut éventuellement discuter ces choix, mais si – et seulement si – on admet d’abord qu’ils sont faits en conscience et dans un réel souci de vivre l’amour humain et l’amour de Dieu.

En conséquence la question sur « le comportement pastoral à tenir en vue de la transmission de la foi aux enfants de personnes de même sexe » ne devrait même pas se poser. Il y a dans la vie de ces enfants suffisamment d’amour et de tendresse pour refléter le visage de Dieu.

 

Question 7. Sur l’ouverture des époux à la vie

On peut s’étonner tout d’abord de la formule « la doctrine d’Humanae vitae sur la paternité responsable ». La maternité n’a-t-elle pas à être responsable ?

« Cette doctrine morale est-elle acceptée ? » Evidemment non, dans un monde où la responsabilité individuelle et collective est une valeur forte, mais aussi où fonder une famille est un choix exigeant, compte tenu des difficultés économiques et sociales. Là encore, légiférer sur ce qu’un couple a de plus intime, ses relations sexuelles et ses choix familiaux, est un total manque de confiance envers les baptisé-e-s. En outre le fait que cette doctrine soit édictée par des hommes célibataires ne plaide pas vraiment en sa faveur…

Que l’Eglise soit attentive au respect de la vie est une chose, mais il est bien difficile de comprendre qu’elle donne des directives précises sur la vie intime des gens. Les chrétiens sont – et seront de plus en plus – instruits, formés, capables de discernement et veulent donc être considérés comme tels. Jésus a fait confiance à ses disciples. Evangéliser, c’est sans doute cela : proposer aux gens le message de Jésus, mais leur laisser leur liberté de conscience et d’action, soutenue bien sûr par une communauté fraternelle (mais non uniforme) de croyants.

Je m’étonne enfin de la dernière sous-question « Comment favoriser la croissance des naissances ? ». Soyons réalistes : l’avenir de l’humanité sur la planète Terre ne peut se concevoir avec une croissance toujours plus importante du nombre de naissances, sauf à admettre ou vouloir que la majorité des humains survivent dans la misère. L’Eglise ne peut ignorer à ce point les données des sciences et doit admettre que la formule « croissez et multipliez-vous » a été écrite à un moment particulier de l’histoire du peuple juif et de l’humanité.

 

MAJ et FJ

 

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Rédigé par jonasalsace

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Publié le 18 Décembre 2013

La foi de l’Eglise


Qui enseigne

L’Eglise catholique n’est pas la seule à dire la foi et la pratique à propos du mariage. Il est scandaleux de qualifier les Eglises orthodoxes en particulier d’une moindre fidélité à l’enseignement du Christ à cause de leur pratique de la « miséricorde ».

 

La réception

Au moment où l’Eglise s’interroge sur la réception de la doctrine, on ne peut oublier les textes des épiscopats commentant l’encyclique Humanae vitae comme partie prenante de l’énoncé et la réception de la foi.

Si l’encyclique parle admirablement de la responsabilité parentale, l’épiscopat français, en particulier, rétablit le primat de la conscience dans le choix des moyens pour mettre en œuvre cette responsabilité, apportant un infléchissement important à certains passages d’Humanae vitae. Cela fait aussi partie de la doctrine et de sa réception.

 

Foi et morale face à l’histoire

Les jeunes chrétiens vivent dans leur immense majorité (plus de 90%)  une vie conjugale avant le mariage. Ils ne pensent pas que c’est là pécher. Que va dire la doctrine quand elle veut prendre en compte l’histoire ? Nous sommes une religion structurellement liée à l’histoire et à son évolution, qui modifient les liens de solidarité et la compréhension de la sexualité.

 

Reconnaissance de nullité

Bien des chrétiens renoncent à demander la « reconnaissance de nullité » de leur mariage qui est devenu un échec. Parce que l’échec n’enlève rien à ce qui a été vécu en vérité et qui fut aussi un épanouissement pour les conjoints et leurs enfants. L’approche juridique de la reconnaissance de nullité  est perçue comme une dévalorisation des personnes et une négation d’une part de sa vie.

 

Echec, faute et évolution

Il faut redire inlassablement la place du pardon dans toute vie de couple pour que celle-ci puisse continuer. Mais il faut prendre en compte les échecs. La miséricorde est toujours la bienvenue. Elle ne suffit pas.

 

L’évolution d’une personne

Le pape François invite à être attentif à la question comment l’homme se comprend aujourd’hui.

Il se perçoit comme une construction, une œuvre à accomplir c’est-à-dire faisant des choix non au gré du vent mais de la foi et de l’expérience de la vie. Ces choix tiennent compte  de l’histoire vécue et des promesses faites, certes, mais des possibilités et des impossibilités pour telle personne de vivre telle ou telle situation. Ce n’est pas un individualisme forcené mais la prise en compte de nos limites dans un monde où les moyens d’autonomie de la personne sont donnés.

Les sciences humaines nous rendent attentifs à des situations conflictuelles insurmontables, qui peuvent apparaître quelle que soit la bonne volonté des personnes et cela ne veut pas dire qu’il y ait eu immaturité antérieure.

Quel que soit le discernement fait, même avec l’invocation de l’Esprit, nos choix sont faits avec la liberté du regard que l’on s’autorise, c’est-à-dire dont on est capable à ce moment-là. La vie commune peut révéler en cours de route, des impossibilités liées à des composantes personnelles et à l’évolution saine  des personnes.

L’homme d’aujourd’hui ne renonce pas à s’engager pour la vie, par amour et de toutes ses forces. Mais il le fait en sachant qu’il n’est pas maître absolu de tout son être. L’évolution d’une personne peut lui faire mesurer combien des « sacrifices » acceptés sont en fait mortifères pour elle-même et pour son entourage.

 

Le manque de foi = un argument bien difficile

Assurément, bien des mariages sont célébrés par des personnes de « peu de foi », ou de foi en Dieu, sans que le Christ ait une place vivifiante, sans que le mystère de la mort et de la résurrection soit reçu. 

Dira-t-on que personne militante, généreuse et à la foi un peu fruste manque de foi suffisante pour le mariage ? Quelle exigence peut-on formuler ? Comment la mesurer ? Pour la réception d’un enfant au baptême, l’exigence de foi est « réduite » à la foi en un Dieu.

Faut-il prévoir une préparation sur une ou deux années comme pour le catéchuménat des adultes ?

 

Le nombre

On ne dira jamais assez que le groupe des divorcés ayant construit une nouvelle histoire d’amour, dans les larmes et la conversion, n’est pas une réalité marginale au sein du peuple de Dieu.

 

L’exigence de réconciliation

La réconciliation, pacification, avec le premier conjoint est souhaitable. Elle est souvent plus facile avec la famille de ce partenaire. Peut-être faut-il travailler à la réconciliation d’un(e)  divorcé(e) avec lui-même, à la pacification des relations avec les enfants.

A ce prix l’accueil à la communion de ces personnes, quand elles vivent une nouvelle alliance, n’est pas un contre-témoignage.

 

Vincent

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Rédigé par jonasalsace

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Publié le 13 Décembre 2013

Groupe JONAS Colmar

Compte rendu de la réunion du 3 décembre 2013

 

Ordre du jour unique : étude du questionnaire préparatoire du synode sur la famille.

 

Les membres du groupe, réunis chez Anne-Marie, ont pris connaissance du questionnaire. En préliminaire du questionnaire, il est précisé que ses questions et les réponses susceptibles d’être apportées,  « permettent aux Eglises de participer activement à la préparation du Synode Extraordinaire qui a pour but d’annoncer l’Evangile dans les défis pastoraux d’aujourd’hui concernant la famille ».

 

Le paragraphe 4 « Sur la pastorale pour affronter certaines situations matrimoniales difficiles » a été retenu pour base de la réflexion et des échanges.

 Les questions ont été abordées dans l’ordre du questionnaire ;

 

a) Le concubinage ad experimentum est-il une réalité pastorale importante dans votre Église particulière? À quel pourcentage pourrait-on l’estimer numériquement?

b) Existe-t-il des unions libres, sans reconnaissance aucune, ni religieuse ni civile? Y-a-t-il des données statistiques sûres?

 

Elles concernent le concubinage « ad experimentum » et les unions libres. On constate qu’aujourd’hui le concubinage est une réalité incontestée. Elle est importante et dooit être considérée comme réalité pastorale. Chez les évangélistes, on ne vit pas ensemble sans être mariés. On constate aujourd’hui moins de mariages civils. On rencontre aussi, de plus en plus de divorcés non remariés. Beaucoup de couples se forment, mais ne s’engagent pas « officiellement », ni civilement, ni religieusement. On ne s’engage plus pour la vie comme « autrefois ». Cependant la venue d’un enfant fait souvent réfléchir et remet parfois les choses différemment.

On se pose la question : comment atteindre les personnes qui sont dans ces situations ?

Différentes réponses ou solutions peuvent exister, mais peut-on généraliser ?

Dans un premier temps déjà, il faut accueillir ces personnes « comme elles sont ».

 

c) Les séparés et les divorcés remariés sont-ils une réalité pastorale importante dans votre Église particulière? À quel pourcentage pourrait-on l’estimer numériquement ? Comment affronter cette réalité au moyen de programmes pastoraux adaptés?

 

Effectivement les séparés et les divorcés remariés sont une réalité importante dans l’Eglise catholique. On peut difficilement chiffrer une quelconque estimation de leur nombre. Pour le moment, les curés, dans les paroisses doivent régler, au cas par cas, ces situations. On ne peut que regretter le flou de cette situation. Chez les Protestants, de nombreux couples demandent une bénédiction à leur pasteur. Chez les Catholiques, cela peut se faire aussi : on peut demander une célébration de prières, une bénédiction. Peu de personnes ont connaissance de cette possibilité. Mais ont-ils été suffisamment informés ? Il y a là une pastorale adaptée à développer.

 

 

d) Dans tous ces cas, comment les baptisés vivent-ils leur situation irrégulière ? Ils en sont conscients ? Manifestent-ils simplement de l’indifférence ? Se sentent-ils écartés et vivent-ils avec souffrance l’impossibilité de recevoir les sacrements ?

 

Les personnes divorcées et remariées, lorsqu’elles s’adressent à l’Eglise, ont le sentiment de n’être pas prises au sérieux et que, pour le moment, rien n’est vraiment institutionnellement prévu. Effectivement, actuellement elles se sentent écartées et vivent avec souffrance cette impossibilité de recevoir les sacrements. A la souffrance de la rupture du couple  s’ajoute celle de ne pas être pleinement accepté dans la communauté ecclésiale.

Une question a été posée : les enfants des parents divorcés ne verront pas leurs parents communier…

On pense aussi que les personnes « écartées » des sacrements, qui continuent à communier, le font en pleine conscience, estimant que ce problème est à régler avec leur conscience.

 

e) Quelles sont les demandes que les personnes divorcées et remariées adressent à l’Église à propos des sacrements de l’Eucharistie et de la réconciliation? Parmi les personnes qui se trouvent dans ces situations, combien demandent ces sacrements?

 

Quant aux demandes que les personnes divorcées et remariées pourraient adresser à l’Eglise, elles consistent essentiellement, d’abord de ne pas être considérées « exclues » des différentes communautés (pour la messe, par exemple, il y a deux groupes, ceux qui vont communier, et ceux qui restent dans leur banc. Ces derniers se distinguent visiblement des premiers.

Quel remède pouvons-nous apporter ? Pour le moment, l’institution est muette. L’Eglise catholique est fermée. Ce qui conduit certains chrétiens à se diriger vers les églises évangéliques ou vers les protestants. C’est un fait connu, les pasteurs sont plus libres par rapport au mariage.

 

f) La simplification de la pratique canonique pour la reconnaissance de la déclaration de nullité du lien matrimonial pourrait-elle offrir une réelle contribution positive à la solution des problèmes des personnes concernées? Si oui, sous quelles formes?

 

La question porte sur la possibilité de « simplifier » la pratique canonique de la reconnaissance de la déclaration de nullité du mariage. Serait-ce une solution ? La nullité est un acte juridique qui porte sur le manque de volonté, de liberté ou sur l’immaturité des personnes, mais en aucun cas sur leur vie.

Le rôle de la conscience n’est pas suffisamment pris en compte.

 

g) Existe-t-il une pastorale spécifique pour traiter ces cas? Comment cette activité pastorale se déroule-t-elle? Existent-ils des programmes à ce propos au niveau diocésain et national ? Comment la miséricorde de Dieu est-elle annoncée aux personnes séparées et aux divorcés remariés ; comment le soutien de l’Église dans leur cheminement de foi est-il mis en acte ?

 

La question porte sur l’existence d’une pastorale spécifique pour traiter ces cas.

La pastorale qui existe en ce moment dans beaucoup de paroisses est surtout fondée sur des initiatives personnelles des personnes avec le prêtre ou le pasteur. Certaines actions pourraient servir de modèles de référence pour définir une pastorale spécifique.

 

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Rédigé par jonasalsace

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Publié le 13 Décembre 2013

 

 

Editorial : La démocratie : utopies et combats

 

La démocratie n’est-elle pas le meilleur système politique pour assurer, au diapason des valeurs évangéliques, le bien commun  (res publica), l’épanouissement des personnes  et l’humanisation du monde ? Inventée à Athènes au VIème siècle av. J.-C., elle renverse  les tyrans pour donner le pouvoir aux peuples, pour promouvoir la liberté et le bien-être des citoyens, et pour résoudre les conflits selon des règles concertées. Après une longue nuit dominée par toutes sortes de pouvoirs totalitaires, dont bien des théocraties, on lui prête la vocation de  réunir l’ensemble de l’humanité sous l’égide de ses idéaux. Le flambeau de la liberté que brandit  la statue d’Auguste Bartholdi à l’entrée de Manhattan est censé indiquer au monde vers quel  horizon progresser. Réaliste ou illusoire ? Question cruciale soulevée par le dossier du dernier  numéro de Parvis, car les croyances sans les œuvres ne sont que vent.

 

Incomparable force d’émancipation et de progrès, la démocratie a de fait instauré plus de liberté, de justice et de solidarité dans nos sociétés et jusqu’au bout de la planète. Proclamant l’égale dignité de tous les hommes face aux privilèges des puissants et des nantis, elle a en maints lieux réussi à organiser la participation de tous à l’exercice du pouvoir, l’accès partagé aux biens matériels et culturels, la liberté individuelle dans le respect des exigences du vivre ensemble. « Liberté, égalité, fraternité », une devise prophétique qui rappelle la révolution évangélique des débuts du christianisme -  « Il n’y a plus ni Juif ni Grec, ni esclave ni homme libre, ni homme ni femme ». Après avoir atteint les sociétés les plus lointaines dans le sillage des Lumières, cet idéal a mené à la «Déclaration universelle des droits de l’homme» adoptée par l’Assemblée générale des Nations-Unies à Paris en 1948. Immense avancée, culture nouvelle, un saut pour l’humanité.

 

Mais l’incarnation des utopies est semée d’embûches : les impostures et les crimes commis au nom des idéologies démocratiques ne se comptent pas, et même le suffrage universel peut conduire au pire. Le sang des tyrans renversés se paye trop souvent d’innombrables victimes innocentes, et de nouvelles tyrannies tentent de se substituer aux anciennes. Notre République a plongé dans la Terreur dès sa naissance ; la démocratie populaire des Soviets s’est soldée par les Grandes Purges et le Goulag ; l’Occident s’est targué de sa civilisation prétendue supérieure pour opprimer et exploiter ses colonies ; et, moyennant le marché et la finance quand ce n’est pas par les armes, les puissances aujourd’hui dominantes imposent des politiques de démocratisation dévoyées pour servir leurs intérêts. Le mépris et le cynisme, la propagande et la corruption sont partout à la manœuvre.

 

Jamais acquise, la démocratie est toujours à conquérir. Comme l’humanité de l’homme. À la fois vulnérable et souveraine, fruit d’un impossible désir et d’un laborieux enfantement, elle est grâce et combat permanent. Elle ne peut naître et se développer qu’en étant sans cesse réinventée, réformée, et défendue contre les forces qui la bafouent. Enracinée dans une inébranlable confiance en l’homme, elle a pour compagne la tolérance fondée sur le respect. Cœur et raison. La démocratie est une passion pour l’humain qui, loin de se réduire aux modalités formelles de son système de fonctionnement, transcende le politique pour sauvegarder l’homme et l’humanité. Dans la civilisation pluraliste et sécularisée qui est la nôtre et face à la globalisation barbare qui menace, les chrétiens doivent, aux côtés de tous les humanistes, servir cette cause au nom de l’Évangile dont ils se réclament.

 

Jean-Marie Kohler

 

 

Présentation du dossier : La démocratie : utopies et combats

 

Le numéro précédent posait la question : humaniser le monde est-il un projet accessible, tant sont puissantes les forces de domination, d’aliénation et de destruction qui y sont à l’œuvre ? Il interrogeait la capacités des religions – et plus largement des diverses formes de spiritualités – qui sont porteuses, au-delà de leurs particularismes, d’une même foi en la vie et en l’être humain à concourir à cette humanisation. Ce dossier s’inscrit dans la continuité ; il traite de la démocratie en tant que régime politique organisant notre vivre ensemble : la façon dont s’exerce le pouvoir contribue en effet à rendre le monde plus ou moins humain.

 

Démocratie : entre aspiration et épuisement (Lucette Bottinelli et Lucienne Gouguenheim)

De façon apparemment contradictoire nous assistons d’un côté à des processus révolutionnaires dans le monde arabe qui chassent des régimes dictatoriaux et témoignent d’une aspiration à la démocratie – sans avoir jusqu’ici réussi à en jeter les bases – et de l’autre côté à un réel essoufflement des régimes qualifiés de démocraties, par la perte de confiance des administrés dans leurs dirigeants. Le recours au processus électoral ne permet à lui seul ni d’instaurer ni de faire fonctionner une démocratie. 

 

De la source athénienne à la démocratie universelle (Jean-Bernard Jolly)

L’origine de la démocratie est athénienne : étymologiquement, la démocratie est « le pouvoir au peuple ». Dans la démocratie grecque, l’ensemble des citoyens d’une cité (les athéniens) décide des lois et réglemente la façon dont le pouvoir politique est exercé. Mais l’empire athénien s’est construit en « convertissant » à la démocratie les cités alliées. L’établissement de la démocratie par la force, alors qu’elle est pensée comme le gouvernement du peuple, est un précédent dont les conséquences pèsent encore sur une démocratie devenue  idéal universel.


Idéaux démocratiques et dérives impérialistes (Jean-Marie Kohler)

Il ne saurait y avoir de véritable démocratie lorsque le bien commun qui unit les hommes est foulé aux pieds au profit d’intérêts particuliers, lorsque les pratiques d’une nation, en son sein ou à l’extérieur, sont en contradiction avec les idéaux qu’elle proclame. Les trois exemples de la Françafrique, de l’ultranationalisme israélien et de l’hégémonie américaine illustrent cette ambiguïté.


Des citoyens lanceurs d’alertes, guetteurs d’apocalypses ? (Françoise Gaudeul)

Des hommes  bravent tous les risques pour privilégier l’intérêt général à l’exclusion de tout intérêt personnel. Ce sont les lanceurs d’alertes, les grands désobéissants de notre époque, qui révèlent dérives ou abus de pouvoir.


Formation, médias et démocratie (Georges Heichelbech)

Quel que soit le système éducatif, est-il possible de donner la même chance à tous les individus, quelle que soit leur origine sociale ?  Les médias tout en étant fondamentaux pour la démocratie sont-ils toujours une chance ou sont-ils parfois un obstacle pour elle ? Jouent-ils toujours un rôle d’information et non parfois un rôle de désinformation ?


La démocratie cognitive et la réforme de la pensée (Edgar Morin)

On dit que les réseaux et l’intégration numérique nous ont fait entrer dans « l’économie et la société de l’information ». Que les savoirs deviennent une sorte de matière première qui circule et s’échange dans le monde entier. Edgar Morin expose la difficulté qu’il y a en fait à atteindre ce à quoi vise la « démocratie cognitive » : la capacité de chacun et de la collectivité à faire des choix d’avenir et orienter son destin.


Démocratie en Europe (Lucienne Gouguenheim)

L’idée d’une solidarité entre des peuples européens libres, égaux et épris de démocratie, qui empêcherait l’émergence de nouveaux affrontements dévastateurs, a constitué un idéal très fort à la sortie de la seconde guerre mondiale. En sont issus  le Conseil de l’Europe, qui veille à l’application de la Conventioneuropéenne des droits de l’homme, et l’Union européenne qui suscite aujourd’hui un rejet croissant et apparaît comme un véritable cas d’école de dysfonctionnement de la démocratie.


L’Eglise catholique au défi de la démocratie (Jean-Paul Blatz)

La réforme de notre Eglise, voire sa reconstruction, ne peut émaner que de sa base, c’est-à-dire du peuple (de Dieu), des femmes et des hommes égaux (comme filles et fils de Dieu par le baptême et sa confirmation dans l’Esprit). Cette démocratie, instituée par le baptême, doit se vivre concrètement dans toutes les structures nécessaires au bon fonctionnement de l’Eglise.


Un enjeu politique : nouer des relations fécondes entre Démocratie et Spiritualité (Jean-Baptiste de Foucauld)

Les démocraties, pour s’accomplir pleinement, ont besoin d’une sorte d’énergie spirituelle interne. Les religions et les spiritualités doivent, symétriquement, opérer une révolution copernicienne d’acceptation et même de valorisation des démocraties. Les terrains d’exercices pour réussir cette rencontre existent.


Lucienne Gouguenheim

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Rédigé par jonasalsace

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