Publié le 6 Janvier 2019
Dans la liturgie de l’Eglise catholique, le dimanche suivant la célébration de la Nativité est fêtée la « sainte famille ». En cette fin d’année de l’an 2018 (30 décembre), dans la messe dominicale diffusée par la chaîne de télévision France 2, l’homélie a été prononcée par un jeune dominicain. Le thème en était la « sainte famille ». Le prédicateur évoqua deux types de familles, les siennes, l’une biologique, l’autre d’affinité. Il a vu le jour dans une famille composée d’un père et d’une mère, les deux étant mariés religieusement (par le sacrement du mariage catholique). Par choix, il a demandé à entrer dans l’ordre des frères prêcheurs qui est devenu sa seconde famille. Le sermon était une sorte de témoignage personnel du religieux.
Cette définition très limitative de la famille, qui est (encore) celle du droit canonique, était couramment vécue par les générations qui nous ont précédés. Alors que les mariages catholiques et les professions religieuses se font rares, n’aurait-il pas été préférable de parler des nouvelles relations vécues en couple ou entre les parents et leurs enfants ? La fonction d’une homélie est-elle de rappeler des souvenirs d’enfance aussi précieux soient-ils pour l’orateur ou plutôt de parler de l’amour vécu entre deux adultes ou entre adultes et enfants ?
Le synode sur les familles avait rappelé, à juste titre, la grande diversité des couples et des familles en ce début de siècle, non seulement dans l’Occident christianisé depuis longtemps, mais aussi dans les jeunes chrétientés où le mariage catholique n’arrive pas à s’imposer.
Ne revient-il pas aux chrétiens d’affirmer qu’à côté de la famille traditionnelle, existent aussi de nouveaux types de famille : monoparentales, recomposées, homosexuelles… ? L’Eglise catholique ne peut plus se limiter à être une conservatrice de traditions religieuses. N’a-t-elle pas essentiellement pour mission d’annoncer la Bonne Nouvelle à nos contemporains en tenant compte de leurs représentations culturelles, de leurs aspirations spirituelles et de leurs désirs de vie et de bonheur ?
Ceux qui s’expriment au nom de l’Eglise catholique ne seraient-ils pas avisés de porter sur les femmes et les hommes de notre temps le regard qui était celui de Jésus ? Peut lui importait que ses compatriotes fussent mariés - une ou plusieurs fois - ou pas mariés du tout. Il était disposé à voir l’amour qui nait et grandit dans toute relation. Il considérait que toute personne éprouve d’abord le besoin d’aimer et d’être aimée.
Plutôt que de continuer à se référer à une image du mariage de plus en plus fictive, les chrétiens ne devraient-ils pas, à nouveau, se tourner vers Jésus et vers la famille atypique qui fut la sienne ? Qui était son père ? Qui était sa mère ? Qui était ses frères ? Jésus a dit : Ma mère et mes frères, ce sont ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui la mettent en pratique (Lc 8, 20). Pour lui, dès que l’amour est présent, il y a famille. L’amour est l’essence des familles dans toutes les acceptions de ce terme.
Dès lors comment peut-on ne pas parler de ces familles d’amour qui unissent simplement deux personnes, qu’elles soient de même sexe où qu’elles partagent tendresse, plaisir et joie dans une nouvelle vie après avoir vécu d’insupportables relations conflictuelles précédemment ? Tout porte à croire que ces familles continueront à se multiplier. Est-ce la vocation des catholiques de les ignorer ?
Jean-Paul Blatz