Maudite et heureuse solitude : Dossier de la evue de la Fédération des Réseaux du Parvis

Publié le 3 Mars 2014

 

Notre époque a-t-elle tué la solitude ? Nos emplois du temps sont surchargés. Nos repos sont envahis de paroles et d'images médiatiques. Nos vacances sont emplies d'activités programmées en avance. Est-ce pour autant que nous vivons des relations humaines épanouissantes ou, confrontés aux conflits, des remises en question non moins nécessaires à nos vies ?  Le stress de nos existences ne cacherait-il pas des solitudes inavouées ? Par une accumulation de liens virtuels et de biens marchands ne cherchons-nous pas à refouler dépression et addictions ? Sommes-nous conscients que notre société d'abondance tolère une autre forme de solitude, celle des personnes privées d'instruction et exclues du partage des biens ?

 

Autant de questions proposées à notre réflexion dans une solitude intérieure, que nous vivions en couple ou en communauté. Là peuvent s'enfanter nos engagements spirituels, éthiques et politiques. Là nous retrouvons la force de croire en l'homme. Là aussi nous préparons notre départ. Lorsque chacun d'entre nous quittera ce monde, seul. L'expérience de la solitude nous libérera peut-être de l'angoisse de l'inconnu et de la peur de perdre les biens du monde pour un passage vécu dans l'apaisement et la confiance.

 

 

  Editorial

 

" Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? " À son paroxysme sur le Golgotha, ce cri de détresse monte vers le ciel depuis des millénaires et retentira jusqu’à la fin  des temps. Il y a trop de souffrance sur notre terre, trop de trahisons et de meurtres. Que  de passions déçues et, pour finir, l’inéluctable passage par la mort ! Et pourtant, la vie l’emporte,  l’espérance et la joie demeurent. Même quand tout semble s’effondrer, l’amour peut subsister et  sauvegarder le monde. Aucune déréliction n’est irrémédiable. Heureux les hommes qui ouvrent  des chemins de libération et de vie à travers les solitudes, qui secourent les malheureux et combattent le mal. Telle est notre vocation sur les parvis et dans la société.

 

La plus répandue des solitudes est celle infligée aux êtres privés du minimum nécessaire pour  vivre humainement. Ils sont innombrables de par la terre, ceux qui ont faim, n’ont pas de logement décent et pas de gagne-pain, ne peuvent pas se soigner et s’instruire, se voient condamnés  à la marginalité et au mépris, sont broyés par les guerres. Au lieu de remédier à la solitude  générée par ces misères, l’ultralibéralisme ne cesse de l’aggraver. La pauvreté est stigmatisée,  voire criminalisée : les exclus sont déclarés coupables de leur exclusion, le peu d’assistance dont  ils bénéficient leur est reproché, et ils finissent par endosser cette culpabilité. Contre ces maux,  l’Évangile appelle à la subversion sociale et politique.

 

La solitude induite par certaines dérives technologiques est plus insidieuse. Il arrive que l’isolement des individus culmine alors qu’ils sont submergés d’ « amis » par les réseaux sociaux, et  reliés au monde entier par un déluge de communications. Évinçant la liberté tout en la glorifiant,  les comportements commandés  par la publicité

créent l’insupportable solitude d’un vide intérieur que la compulsion consumériste ne peut pas combler. Accumulation de liens virtuels et de biens marchands. SMS insignifiants, multiple boulimie, chaises roulantes alignées devant la  télé dans les hospices, c’est le règne des addictions et de la dépression. Prodigieux est cependant  le progrès technologique quand il est mis au service de l’homme.

 

Sous couvert d’épanouissement, le narcissisme véhiculé par le marché ouvre sur un gouffre  de solitude. Chacun est sommé d’assouvir de suite et sans états d’âme les désirs d’un ego invité  à se vouloir roi ou dieu. L’idéologie régnante démocratise cette perspective en la banalisant, et s’ingénie à en occulter les enjeux tragiques. Le «moi» hypertrophié et décomplexé abusera sans vergogne d’autrui et du monde. Obsession de jouissance et de pouvoir enracinée dans l’archaïque rêve de toute-puissance infantile. Illusoire liberté, antichambre du néant peuplée d’ombres où le «je» privé de partenaires s’évanouit. Mais le bonheur peut-il éclore hors du  partage, hors d’un vivre ensemble au service de tous et respectueux de l’avenir ?

 

Aux antipodes de ces fléaux, une heureuse solitude  offre sa fécondité à tous les hommes passionnés d’amour, de liberté et de création. Aux plus humbles comme aux penseurs, aux artistes, aux mystiques, aux prophètes profanes et religieux. Une sublime et modeste solitude intérieure  à la dimension de la terre et des cieux, d’où sourd la force de croire en l’homme et en l’infini qui  le transcende. Là s’enfantent notre être unique et les engagements spirituels, éthiques et politiques qui délivrent les humains des solitudes maudites. Accueil de l’altérité avec les joies qu’elle  prodigue, et pari pour la vie en dépit des limites de notre finitude. Pour accomplir l’homme, la  haute solitude et la communion s’appellent et se conjuguent.

 

Jean-Marie Kohler

 

 

 

Sommaire des articles du dossier

 

 

Seul, avec la terre et le ciel en partage (Jean-Marie Kohler)

La douloureuse béatitude d’un exclu : humble parmi les humbles, il avait pour premiers compagnons la terre, les arbres, les animaux, et des enfants. Laissé de côté par la société, il se savait habité par une force qui le gardait disponible à autrui et heureux en dépit de tout. Parce que unique et libre, l’homme vit seul de sa naissance à sa mort, mais il ne devient homme et ne peut le rester que grâce aux autres qui peuplent sa solitude et la transforment en communion.

 

Chantal et Antoine, solitude à l’hôpital psychiatrique (Philippe)

Dans ce lieu largement stigmatisé, Philippe nous raconte deux parcours étonnants ; celui de Chantal qui sait que son amour viendra la chercher et qui attend ce moment depuis trente ans sans se soucier d’autre chose, et celui d’Antoine qui déborde de manifestations d’affection dans l’espoir de quelques rayons de soleil en retour.

 

L’appel de la solitude (Daniel Duigou)

Inspiré dès son jeune âge par la lecture de Charles de Foucauld, Daniel Duigou -psychanalyste, journaliste et prêtre - a quitté la ville pour un ermitage perdu au Maroc. Ce n’est pas pour mourir qu’il a "quitté", mais pour se réaliser dans son existence d’homme. Chacun de nous est appelé à réinterpréter sa vie selon une coupure qui sépare et donne naissance. Quelles sont nos difficultés pour vivre la séparation et gagner notre autonomie ?

 

La solitude en France aujourd’hui (Lucienne Gouguenheim)

Une récente enquête de la Fondation de France a révélé que 5 millions de personnes sont actuellement touchées par la solitude (peu ou pas de relations sociales dans les divers réseaux habituels de sociabilité), ce qui représente 2 millions de plus qu’en 2010. Analyse des principaux facteurs de la solitude, des lieux où elle progresse, des solutions pour en sortir - avec en exemple Les jardins partagés et La réhabilitation de logements par les habitants eux-mêmes.

 

Seul dans la foule et dans la ville (Georges Heichelbech)

Une des principales mutations en cours réside dans le passage de la société communautaire traditionnelle à une société individualiste urbaine, où l’individu échappe à la pression du groupe. La solitude n’est pas simplement le fait de vivre seul, mais plutôt le sentiment de ne pas être reconnu, de ne compter pour personne, d’être rejeté par les autres. Comment créer de la mixité et du lien social dans les banlieues et les cités dortoirs ? Question de moyens, mais aussi de volonté.

 

La solitude à l’époque des nouvelles technologies de l’information (Anthony Favier)

 

La « révolution » numérique change la communication dans nos sociétés, mais elle ne parvient pas toujours à remédier à la solitude. Il ne suffit pas de se rassurer par le contact avec un grand nombre de personnes soigneusement tenues à distance ! Ces relations s’avèrent souvent inconsistantes. La solitude numérique nous renvoie à nos propres lignes de fractures sociales et nous rappelle que la justice et la dignité vont au delà de la satisfaction des besoins matériels. Comment passer du repli à l’ouverture sur la sociabilité numérique ?

 

Solitude au soir de la vie (Réjane Harmand)

Vers la fin de leur vie, beaucoup éprouvent le besoin de reconsidérer ce qu’a été leur existence, les étapes parcourues et les changements intervenus, afin de se centrer sur l'essentiel. Que de certitudes abandonnées pour de nouveaux horizons ! Donner un sens à ma vie, donner un sens à ma mort… Bien que prévisible, le départ de ceux que l’on aime représente toujours un bouleversement, une souffrance qui peut nous isoler, mais qui peut aussi nous ouvrir et nous aider à avancer.

 

Bienheureuse solitude... (Françoise Gaudeul)

La solitude semble être la cause de tous les malheurs pour les uns, tandis qu’elle représente le seul remède à la douleur de vivre pour les autres. Dans certaines traditions, elle est le passage obligé vers la communication universelle. Elle s'apprend, elle est conquête personnelle pour une rencontre avec soi-même, avec l'autre, avec un être transcendant, avec Dieu…

 

La solitude : malédiction ou vertu ? (Jean-Paul Blatz)

Les théologiens juifs et chrétiens ont cherché à donner sens à la solitude, à y remédier ou à en faire une vertu. De la solitude de l’homme dans le Premier Testament à celle que Jésus a lui-même recherchée ou subie, puis à la solitude de ses disciples invités à vivre dans la fraternité, nous sommes amenés à trouver Dieu dans la communauté, et Il nous conduira vers la solitude !

 

La solitude dans d’autres cultures et religions (Jean-Pierre Schmitz)

Le besoin de solitude est évoqué dans de multiples textes religieux et philosophiques  partout dans le monde. L’isolement et la solitude sont deux choses différentes. En Extrême-Orient, la densité des foules semble exclure la solitude. Mais Bouddha a enseigné que la véritable solitude est intérieure, et Lao Tseu a dit que l’homme sage a besoin d’être seul pour embrasser sa solitude et réaliser son unicité avec tout ce qui est.

 

L’être humain, pèlerin solitaire (Jean-Bernard Jolly)

« Nu je suis sorti du ventre de ma mère, nu je retournerai à la terre. » Evocation du dénuement et de l’isolement de l’homme, de sa naissance à sa mort, dans le livre de Job. Chaque pèlerin solitaire mène sa vie dans le rapport aux autres. Rapport original vécu entre la conscience de l'individu et la contrainte du groupe. Il revient à chaque être humain de faire pour lui-même le choix de sa vie, sans se laisser aliéner par les conditionnements sociaux et les rites.

 

Françoise Gaudeul

 

 

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Rédigé par jonasalsace

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G
<br /> Nota bene : après consultation de votre site, ma famille et moi-même sommes particulièrement attristés de constater les orientations que vous souhaitez voire prendre à notre église. Les propos<br /> tenus, ultra-progressistes, vont à l'encontre de l'éthique de l'Eglise de Rome, des ses valeurs... A quoi bon vivre en l'église si celle-ci en arrive à se conformer aux volontés humaines et non à<br /> celle du Seigneur. En ne se conformant pas à ce qui vous est enseigné dans les saintes écritures et aux exhortations de nos papes successifs, vous détournez chaque chrétien de la vérité et<br /> l'incitez à prendre des voies tortueuses qui ne font qu'assouvir vos propres désirs terrestres. Nous comprenons votre soif de pouvoir sur l'église et les catholiques, ce qui est misérable et<br /> vient complètement discréditer vos publications pernicieuses.<br />
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